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Le bien-être animal, vraiment une priorité du Gouvernement bruxellois ? Décryptage du budget 2023

Le 30 novembre, le Gouvernement bruxellois a présenté aux parlementaires son projet de budget 2023 pour le bien-être animal.


Dans la foulée, le Ministre en charge, Bernard Clerfayt, soulignait dans la presse que la protection des animaux constitue une priorité pour la Région. Au-delà des annonces, qu'en est-il réellement ? Décryptage du budget 👇👇👇

Quel budget ?


En 2023 et au global, la compétence du bien-être animal sera financée à Bruxelles à hauteur de 2,5 millions d'euros. On peut se réjouir que cette matière reçoive un budget spécifique. Mais il serait très exagéré d'en conclure qu'il s'agit une priorité du Gouvernement.


Car si on la compare avec la trentaine de compétences explicitement exercées par les différents ministres du Gouvernement, celle du bien-être animal reste l'une des moins budgétisées. Logiquement très loin derrière des politiques centrales telles que celles des transports en commun (1,2 milliard) ou du logement (540 millions), mais aussi loin derrière d'autres matières comme le tourisme (22 millions) ou la « promotion de l'image nationale et internationale » de Bruxelles (9,3 millions).


Des problèmes à la pelle


L'autre question centrale est : comment le Gouvernement compte-t-il utiliser ces 2,5 millions pour améliorer la condition animale à Bruxelles ?


Dans ses annuelles notes d'orientation budgétaire, le Ministre en charge identifie correctement une série de problèmes de détresse animale. C'est déjà une bonne chose. Ce qui est, par contre, plus inquiétant, c'est que certains de ces problèmes semblent s'aggraver d'année en année. Quelques exemples :

  • Sur le terrain, la situation des chats errants est catastrophique. De plus en plus, les associations tirent la sonnette d'alarme. Dans les faits, la stérilisation obligatoire des chats domestiques par les particuliers n'est pas respectée.

  • Beaucoup de refuges et d'associations de terrain peinent à garder la tête hors de l'eau. Quand le manque structurel de fonds ne menace pas leur subsistance, ils doivent refuser la majorité des animaux qu'on abandonne, faute de place.

  • Fréquemment alertés concernant des chiens détenus dans de mauvaises conditions, les inspecteurs du bien-être animal sont dans l’incapacité d’intervenir par manque de base légale.

  • Après une tendance baissière enregistrée les années précédentes, les statistiques de l'expérimentation animale à Bruxelles stagnent : en 2021, 55.473 individus ont été utilisés, torturés puis tués dans les laboratoires de la Région.

  • Chaque année, l'abattoir d'Anderlecht met à mort 50.000 animaux pour satisfaire nos habitudes alimentaires, la plupart sans aucune forme d'étourdissement.

Quelles actions concrètes ?

Alors, qu'y a-t-il dans le budget 2023 pour régler ces problèmes ? Six points :

  1. Sur les 2,5 millions de budget global, près d'1 million est consacré à la rémunération du personnel du département Bien-être animal de l'administration publique (Bruxelles Environnement). Ce département est composé de 12 personnes, dont seulement 5 inspecteurs. C'est une critique fondamentale à formuler : avec si peu de personnel, il est impossible de contrôler correctement tous les lieux de détention d'animaux (laboratoires, animaleries, élevages, abattoir, refuges, en plus du traitement des plaintes pour maltraitance et des autres demandes). Or, pour 2023, le Gouvernement bruxellois s'est à nouveau refusé à augmenter l'enveloppe allouée à ce département Bien-être animal, qui ne constitue que 1 % du personnel de Bruxelles Environnement.

  2. Le Gouvernement avait annoncé une augmentation budgétaire de 100.000 euros afin de renforcer le soutien financier aux communes et aux associations pour leur travail de protection des animaux. Mais dans le détail, ça donne quoi ? En fait, sur ces 100.000 € supplémentaires, seuls + 12.000 € iront aux associations ! Les subsides qu'elles reçoivent étaient déjà une infime fraction des frais qu'elles doivent débourser, malgré le service d'utilité publique qu'elles rendent. Mais cette hausse de 12.000 €, à répartir entre toutes les associations, permettra à peine de couvrir l'augmentation des prix de l'énergie et des marchandises. Ce tout petit effort budgétaire est une grande déception.

  3. En revanche, 90.000 € supplémentaires iront bien aux communes, afin de soutenir leurs mesures de protection des animaux (gestion des chats errants, primes à la stérilisation, présence d'un référent pour le bien-être animal dans les zones de police, etc.). Ca, c'est une vraie bonne nouvelle. Reste à espérer que les communes suivront l'appel.

  4. Une autre grosse partie du budget m'interpelle. Plus d'1/4 des 2,5 millions servira à financer le travail d'un bureau d'avocats en matière de bien-être animal (670.000 €). C'est un peu moins que le budget alloué en 2022 pour cette même activité, mais on sait qu'en 2022, ce bureau était chargé de rédiger le futur Code du Bien-être animal (une refonte de la législation en la matière). Or, la rédaction de ce texte est censée être terminée, puisqu'il sera présenté en Conseil des Ministres début 2023. Sur quoi travaillera ce bureau d'avocats en échange de 670.000 € ? À ce stade, mystère...

  5. Le Gouvernement prévoit le lancement en 2023 d'une nouvelle campagne de sensibilisation à la stérilisation des chats domestiques. Une bonne démarche, mais ce n'est pas la première du genre. Espérons que celle-ci porte davantage ses fruits... en attendant qu'on se décide à agir par le biais de sanctions...

  6. Le dernier gros poste concerne le financement de la recherche et de la promotion des alternatives à l'expérimentation animale, une mission confiée à la VUB. C’est évidemment une bonne chose. Mais comme dit plus haut, les dernières statistiques issues des laboratoires ne sont franchement pas rassurantes. Depuis des années, j'encourage le Gouvernement à réfléchir à des mesures plus contraignantes afin d'au moins atteindre l'objectif de réduction drastique du nombre d'animaux en labo, qu'il s'est lui-même fixé. Jusqu'ici sans succès.

Enfin, pendant la présentation du budget, j'ai insisté – et continuerai d'insister – sur d'autres problématiques qui ne bénéficient pas de financement spécifique mais qui sont bien présentes à Bruxelles, et sur lesquelles le Gouvernement s'était engagé à agir : la gestion douce des populations de pigeons ; la nécessité d'instaurer un système de permis de détenir un animal ; la consommation de produits d'origine animale, qui est évidemment la première cause de souffrances, etc.

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