Intervention prononcée le 17 décembre 2021 en séance plénière budgétaire du Parlement francophone bruxellois.
Madame la Ministre-Présidente, il y a quelques semaines, vous avez présenté l’ajustement du budget 2021 et le budget initial 2022 en mentionnant que ceux-ci ont malheureusement dû être élaborés dans un contexte de grandes incertitudes. Et on peut comprendre qu’il s’agit d’un exercice d’autant plus périlleux que les matières dont la Cocof a la charge touchent directement à des aspects fondamentaux de la vie des Bruxelloises et des Bruxellois, a fortiori en temps de crise.
Et si le collège a pu boucler un budget 2022 initial en équilibre, il faut tout de même rappeler la particularité de cette institution, dont le fonctionnement indispensable à la vie de beaucoup de citoyens dépend de la bonne générosité et du bon dialogue avec les autres entités fédérées.
À ce titre, on peut certes se réjouir de la dotation supplémentaire dégagée par la Région bruxelloise, qui permet au Collège de poursuivre ses nombreuses politiques, et de renforcer une série d’entre elles. Mais d’un autre côté, on se rend compte en parcourant les différents programmes que de nombreuses matières mériteraient un financement plus conséquent.
Puisque je ne dispose que de 5 minutes, je ne pourrai pas aller beaucoup dans le détail, ni être exhaustive. Mais pour poursuivre sur une note positive, l’élément le plus notable de cet exercice est peut-être l’augmentation de la provision pour le secteur non-marchand à hauteur de 6,3 millions d’euros, en vue de la conclusion du nouvel accord non marchand 2021-2024. Cette revalorisation est évidemment une très bonne nouvelle, pour des secteurs qui en avaient bien besoin.
Autre point positif, c’est évidemment la mise en œuvre d’une aide aux clubs sportifs à hauteur de 5,2 millions d’euros grâce au montant débloqué par la Région. Entre parenthèses, ce financement illustre à nouveau la particularité institutionnelle de la Cocof, mais au moins le secteur des clubs de sport peut légèrement souffler grâce à ce financement et cette politique, qui accorde également une attention au handisport et au sport féminin.
Cependant, vu les moyens insuffisants dont dispose le Collège au vu des matières qu’il doit gérer, en plus du fait que la plupart des dépenses dans plusieurs politiques sont consacrées au subventionnement d’associations, il est permis de craindre certains effets pervers de mise en concurrence de ces organismes sous la forme des appels à projets.
Pour ce qui concerne l’EVRAS, je me réjouis de l’augmentation graduelle des budgets ces dernières années, qui s’élève désormais à 900.000 euros, et du fait qu’on poursuit les efforts en vue de sa généralisation à Bruxelles, même si, comme tout le monde je pense, je regrette que cela prenne autant de temps. Je comprends bien qu’il y ait plusieurs obstacles, et j’ai également noté l’explication que vous avez donnée, Madame Trachte, selon laquelle le Collège fait déjà plus qu’il ne devrait par rapport à d’autres entités et niveaux de pouvoir. Mais quoi qu’il en soit, j’espère que l’on pourra vraiment atteindre une généralisation rapidement.
C’est d’autant plus important au regard de la transversalité entre l'éducation à la vie affective et sexuelle et des éléments médiatiques qui ont éclaté ces dernières semaines à Bruxelles, comme par exemple l’initiative “balance ton bar”. On voit que beaucoup reste à faire pour que la ville soit un endroit sûr pour tout un chacun, et pour les femmes en particulier. À ce propos, je lis aussi l’intention de renforcer la politique d’égalité des chances au moyen d’un budget s’élevant à un peu plus de 100.000 euros, notamment dans le cadre du Plan inter-francophone de lutte contre les violences faites aux femmes.
Je passe au volet cohésion sociale, pour saluer l’augmentation substantielle du budget, à hauteur de près d’un million et demi, même si des retards sont prévus dans le déploiement des futures mesures du décret cohésion sociale. Il n’empêche que le soutien octroyé par le collège à plus de 200 associations est indispensable si l’on veut favoriser l’inclusion sociale dans une Région qui ne pourra pas s’en sortir autrement, et ainsi renverser les discours de stigmatisation.
Quelques mots sur la politique de formation professionnelle, qui, on le sent, correspond à une vision prônée par le collège. Même si là aussi, on peut se demander si les moyens limités de la Cocof suffiront, d’autant plus dans le contexte actuel toujours très incertain. Parce que d’une part, il y a le nombre dramatique de plusieurs dizaines de milliers de nouveaux chercheurs d’emploi auquel on s’attend, mais d’autre part, il y a aussi les difficultés à organiser des formations en temps de pandémies. Je lis que les formations à distance ont heureusement pu augmenter de 40 %, mais il me semble qu’il subsiste beaucoup d'incertitudes. Et la nécessaire augmentation du budget de Bruxelles Formation à hauteur de 5 millions est une bonne nouvelle, mais elle ne couvre principalement que l’indexation des salaires.
J’en termine avec les politiques social-santé, dont la priorité pour le Collège est de parvenir à une réduction des inégalités sociales, notamment de santé. C’est un objectif avec lequel on ne peut qu’être d’accord, et je souhaite beaucoup de succès dans ces politiques. Elles sont nombreuses, et concernent plusieurs publics qui sont véritablement dans le besoin. Mais je ne peux m’empêcher de penser qu’un pan essentiel de la promotion de la santé est sous-exploité par l’action de la cocof, à savoir l’alimentation. Je m’excuse si je vais me répéter par rapport à ce que j’ai déjà exprimé il y a quelques semaines suite à la déclaration de politique générale, mais on a tendance à oublier à quel point la promotion d’une bonne alimentation se trouve au carrefour de la santé, du social et de l’environnement, en plus du fait qu’il s’agit d’un levier de prévention en vue de futures crises. Dans son ordonnance climat, la région s’est fixé l’ambition de réduire nettement ses émissions indirectes de gaz à effet de serre, et c’est un objectif qui devra être suivi par l’ensemble des entités. Mais on n’y arrivera pas sans montrer une plus grande ambition par rapport à l’alimentation, qui représente à elle seule ¼ des impacts environnementaux des ménages, à cause très clairement de la surconsommation de produits d’origine animale, qui impacte d’ailleurs négativement la santé des Bruxelloises et des Bruxellois. Alors dans son action de promotion de la santé, la Cocof subsidie certes une série d’associations - la liste en a été fournie pour 2021. Mais, sauf erreur de ma part, aucune ne se consacre de façon centrale à l’alimentation, et seule une poignée d’entre elles y fait référence. Je vous encourage donc à redoubler d’ambition par rapport à cette matière qui me semble primordiale.
Donc pour conclure, les efforts et les avancées qui sont affichés pour 2022 méritent notre soutien, et je souhaite beaucoup de succès dans les différentes politiques du collège, mais je me permettrai de m’abstenir sur ces projets de budget vu le goût de trop peu que laissent certains aspects.
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